Discours funèbre pour les obsèques d’Alfred Kuhn du Président des Sauveteurs de la Gironde Pierre-Christian LANDRY.


Version texte
SAUVETEURS DE LA GIRONDE ET MÉDAILLÉS DU GOUVERNEMENT
Discours funèbre pour les obsèques de notre sociétaire et Ami Alfred KUHN
Ce lundi 28 décembre 1987 à 14 heures 45
Il est des circonstances douloureuses dans lesquelles il devient bien difficile et bien pénible de remplir son devoir; celui qui m’incombe en ce jour m’attriste profondément.
C’est en proie à une profonde émotion que je viens au nom des Sauveteurs de la Gironde, de la Charente, de la Vienne, de la Haute-Vienne, adresser un suprême adieu à l’Homme de Bien que la mort nous a ravi; car rien ne pouvait faire prévoir la fin prématurée d’un homme que nous étions si heureux de compter au nombre de nos plus affectionnés amis.
Il manque, ici, je le sais très intimement, quelques uns de ses anciens camarades qui auraient désiré être avec vous pour accompagner ALFRED à sa dernière demeure, mais empêchés par la distance qui les sépare de la commune, ils y sont par la pensée et par le cœur.
Il a plu à Dieu de rappeler à lui cette belle âme qui, durant son séjour ici-bas, a tout fait pour le bonheur de ses semblables.
Les éminentes et solides qualités de son caractère, sa nature franche et loyale lui avaient valu l’estime et la sympathie de tous.
Animé du noble désir de se dévouer à son pays d’adoption et à ses concitoyens, ALFRED faisait parti depuis de longues années du conseil d’administration de la Société des Sauveteurs de la Gironde.
Je me souviens encore la joie avec laquelle il accueillit sa nomination comme administrateur Directeur des Recherches Historiques de notre Société; il travaillait, alors, activement à la prospérité, à la grandeur de cette œuvre de haute portée sociale et historique. Il avait remonté son histoire jusqu’en 1879, la Société étant créée en 1853 sous le nom de Société d’Entraide Mutualiste des Sauveteurs. Mais, hélas! le destin ne lui a pas permis de réaliser tout son généreux programme.
Cependant, parlerai-je du Sauveteur, mais de l’Homme dont, avec ses proches, et plus que quiconque, je déplore l’absence? Je ne saurais pas tout dire de sa vie, honnête et laborieuse.
Ce qui est sûr, son affabilité et la sûreté de son jugement avaient su conquérir l’estime et la sympathie de chacun de ses supérieurs et du personnel tout entier.
– Né le 8 juin 1923 à LEIPZIG, d’une famille modeste mais foncièrement humaniste, il est élevé dans l’honneur et le respect d’autrui En fait, sur le banc des écoles, il a toujours été avec espièglerie un élève docile et travailleur.
À l’aube de se perfectionner, il est appelé, malheureusement comme tant d’autres, sous les drapeaux en 1940. Il rejoindra une unité prestigieuse de la marine dont elle n’aura pas à rougir,
– Nous non plus –
Son navire coule au large de la Gironde, de bon Soldat, ALFRED devient un Sauveteur exemplaire. Ne connaissant pas la devise des Sauveteurs de la Gironde et Médaillés du Gouvernement:
« Sauver ou Périr
Notre Âme à Dieu,
Notre Vie à nos semblables »
l’a met en pratique trente huit ans avant. Il sauve et ses camarades blessés ou mutilés, et de ses adversaires saignants ou brûlés versés dans cette Gironde inhospitalière jusqu’à épuisement total. Les autorités canadiennes lui décerneront le 29 avril 1944 la plus haute distinction humanitaire la médaille universelle de sauvetage.
– Après la guerre, par un heureux hasard, il rencontre sa future épouse. Ils se marient, un fils naît, puis une fille.
Il donne enfin la mesure de sa réelle valeur, dans l’Est de la France, travaillant 22 ans dans les houillères.
Revenu dans le pays de sa belle-famille, il met au service de ses nouveaux employeurs, un zèle et une application exemplaire.
Sans cesse à la recherche d’amélioration, se rapproche de Bordeaux. Se fixe à Carbon Blanc sur la terre de famille.
– La chance lui crée de remarquables rapports humains. Il entre ainsi dans la Société FORD dans laquelle il fait montre d’une remarquable efficacité, passionnément épris de ses responsabilités. ALFRED était à la veille de prévoir la réversibilité de la pension de retraite bien acquise.
– En dehors de son travail, de ses responsabilités familiales, il se dévoue, partout où il est, auprès des ambassades; traducteur pour les uns, membre actif entreprenant des actions sociales, humanitaires tant pour les scolaires que les adultes, les recherches des disparus, et plus encore…
Il prenait part aux travaux de sa commune et aux relations de jumelage CARBON BLANC – GROSSOSTHEIM.
Il avait fait l’impossible pari de réhabilité le cimetière marin de BERNEUIL, en Charente, où fut édifié avec le concours des municipalités concernées et le conseil général, une stèle à la mémoire de ses frères d’armes morts en territoire aquitain et sur les plages du Médoc.
– ALFRED entre à la Société des Sauveteurs de la Gironde et Médaillés du Gouvernement à titre de Sauveteur médaillé, reçoit la Médaille d’Argent n° 82. 137 B pour actes de Sauvetage et Dévouement Péril-Vie.
Que sa fidèle épouse qui a été admirable de dévouement depuis le premier jour de leur Amour, ses enfants et petits-enfants me permettent de leur exprimer, ici, non de vaines consolations, mais notre profonde et sincère sympathie.
Reposez en paix, mon cher ALFRED, l’œuvre a laquelle vous avez collaboré, avec toute l’ardeur d’une conviction sincère, accomplira fatalement son évolution vers cet idéal de fraternité et de solidarité européenne et internationale que vous avez rêvé de voir briller sur le monde, en apportant à 1’homme un peu plus de bien être, de justice, et de vérité: ” L’Homme, a dit l’écriture, ne meure pas tout entier, il laisse derrière lui la trace de ses vertus” .
Le Président des Sauveteurs de la Gironde
Médaillés du Gouvernement à un Ami
Pierre-Christian LANDRY